La 6e édition du Concours International de Piano Istanbul Orchestra’Sion

Depuis 2013, le lycée français Notre-Dame de Sion d’Istanbul organise tous les deux ans un concours international de piano. (avec des propos recueillis par Sophie Clément et Gabrielle Mahias)

Par Sophie Clèment
Publié en Juin 2024

Le concours comptait 38 inscrits la première année ; en 2024, ce ne sont pas moins de 149 candidats qui ont tenté leur chance. Dès le départ, l’ambition du concours était de figurer parmi les évènements musicaux majeurs en Turquie, voire à travers le monde. C’est effectivement le statut que la compétition a réussi à atteindre en l’espace de quelques éditions, grâce à des jurys reconnus mondialement et des récompenses qui offrent de réels tremplins pour la carrière des pianistes.

Cette année, ce concours professionnel s’est déroulé du 1er au 4 avril et a réuni une fois de plus des pianistes professionnels du monde entier. Les trois premiers tours éliminatoires ont lieu dans la belle salle de spectacle du lycée Notre-Dame de Sion, où les candidats se sont successivement affrontés en interprétant des œuvres très variées, allant du baroque à la musique contemporaine. Ce répertoire doit être aussi large que possible afin de permettre au jury d’apprécier toutes les qualités d’analyse et d’interprétation des candidats. Le dernier jour de compétition est celui de la finale qui se déroule dans la salle de concert Cemal Reşit Rey à proximité du lycée. Les pianistes finalistes interprètent un concerto de leur choix, accompagnés par Orchestra’Sion placé sous la direction d’Orçun Orçunsel, ainsi qu’un morceau imposé composé par Cemal Reşit Rey, en référence à la salle, et doté d’un prix spécifique dans le concours. Après la finale, a lieu la cérémonie de remise des prix, présentée cette année par une journaliste ancienne diplômée de NDS.

Le jury du concours 2024

Scrutant dans les moindres détails les prestations des candidats, les membres du jury ont procédé à un classement chaque jour. Pour ce jury composé de pianistes renommés sur le plan international, venant de nombreux pays du monde, ce type de concours est aussi d’un très grand intérêt.

Jean-Yves Clément : « Mon rôle de président du jury me permet de contrôler le niveau du concours »

Président du jury pour la deuxième fois, Jean-Yves Clément choisit et invite les membres du jury à chaque édition de façon à garantir un niveau d’excellence internationale, voire d’améliorer le niveau à chaque édition. Il préfère d’ailleurs n’inviter que des pianistes concertistes et qui connaissent la vie d’artiste au quotidien dans le travail, ainsi que le potentiel maximum que chaque pianiste peut espérer atteindre.

Gülsin Onay : « Il y a trois choses essentielles chez un musicien : le physique, l’intelligence, et le sentimental »

Il y a une puissance musculaire et une agilité à maîtriser, une capacité à analyser la musique pour savoir jouer les œuvres, ainsi qu’une personnalité et des émotions à transmettre à travers ses doigts. Tout cela a été scrupuleusement observé et écouté par Gülsin Onay, qui serait potentiellement partante pour voir certains candidats en concert !

Etsuko Hirose : « Les concours sont toujours passionnants à suivre »

La pianiste japonaise était très heureuse de voir son pays représenté de la meilleure des manières lors de la finale. Souvent en concert, elle ne peut que rarement être dans des jurys de compétitions comme celui-ci, c’est pourquoi elle a apprécié son rôle de membre du jury et a suivi avec attention les surprises que le concours lui a réservées. Qu’elles soient bonnes ou mauvaises, ce sont d’ailleurs ces surprises qui lui font dire que les concours sont toujours passionnants à suivre.

Toros Can : « L’environnement du concours compte beaucoup, notamment le contexte mondial. »

Le pianiste Toros Can justifie certaines surprises du concours par le contexte qui influe directement sur le jeu des candidats, même si le cadre du lycée est propice aux belles performances. Il explique aussi que le piano prêté par İKSV pour le concours était tout à fait adapté, car il offre assez de résistance. Selon ses dires, le piano doit être comme un animal sauvage à dompter !

Lukas Geniušas : « Entre les demi-finales et la finale, on a atteint un niveau franchement élevé ! »

Le soir de la demi-finale, l’exigeant Lukas Geniušas prédisait pour la finale un beau concert, et Youl Sun était son favori, comme les autres membres du jury. La finale renversante a prouvé que jusqu’au bout, rien n’est joué ! Aussi, ce génie russo-lituanien estime que le concours est intéressant pour les pianistes car il les aide à changer de répertoire en un court instant, ce qui est très proche de la réalité où il faut parfois passer du coq à l’âne entre deux festivals qui s’enchaînent.

Anna Geniushene : « Sur mes trois candidats préférés du premier tour, trois sont en finale ! »

La pianiste Russe Anna Geniushene, à la fin de l’épreuve de la demi-finale, affirmait avec un large sourire qu’elle avait prédit ce qui allait se passer ! Et ayant conscience de ce que les pianistes ressentent et vivent pendant les compétitions, elle disait déjà à ce moment-là qu’entre les demi-finales et la finale, il y a un grand écart à assumer qui peut amener à un renversement de situation, en raison de la fatigue, du stress, du changement d’épreuve. Là encore, de très belles prédictions de la part de cette immense artiste russe.

Olivier Gauvin : « une technique irréprochable, une originalité dans l’interprétation ».

Le consul général de France à Istanbul Olivier Gauvin est aussi pianiste de formation. Avec le soutien de l’Institut français, il a remis son prix lors de la compétition, moment qu’il a beaucoup aimé. Selon ces critères : une technique irréprochable, une originalité dans l’interprétation et un jeu avec une réelle personnalité, Olivier Gauvin a choisi un candidat à la hauteur du Festival Berlioz en France, où il se produira.

Franck Ciup : « Si l’on écoute avec le cœur, on peut comprendre qui joue le mieux. »

Président du jury des élèves, ce passionné est très content et très fier de son jury d’élèves. L’encadrement de ces derniers est toujours intéressant puisque, dit-il, même sans connaître la musique et le piano, on peut sentir et reconnaître le talent. Ce jury des élèves existe depuis cinq éditions et n’a cessé de grandir, et l’envie et la motivation sont toujours très présentes, souligne Franck Ciup.

Orçun Orçunsel : « Lors de la finale, Teppei Kuroda s'est immédiatement distingué par la profondeur et la subtilité de son interprétation de Mozart. »

Pour Orçun Orçunsel, le chef d’Orchestra’Sion, « La finale de la 6e édition du concours a été aussi passionnante que l’édition précédente. Je pense que le classement de la compétition a dû être décidé relativement facilement. Teppei Kuroda, le lauréat de cette année, s'est immédiatement distingué lors de sa prestation de la finale par la profondeur et la subtilité de son interprétation de Mozart. Lorsqu'il jouait le deuxième mouvement du concerto de Mozart, l'orchestre s'est adapté à la sonorité de Kuroda sans mon intervention. C'est le signe que les musiciens ont beaucoup apprécié les œuvres qu'ils ont jouées. » 

L’organisation, l’un des atouts majeurs du Concours

Emmanuelle Beaufils : « Nous sommes toujours impressionnés par les candidats, doués d’une grande force de caractère qui s’impose toujours avec respect et gentillesse. »

L’excellente organisation du concours, on la doit une fois de plus à la secrétaire générale Emmanuelle Beaufils et son équipe, qui ont travaillé pendant près d’un an pour offrir les meilleures conditions d’accueil possibles aux membres du jury et pianistes. Car un cadre agréable pousse à l’excellence. Au-delà du stress et du travail, Emmanuelle Beaufils a été particulièrement satisfaite de cette édition et tient à mettre en avant les différents acteurs du concours pour célébrer cette réussite.

Elle remercie en premier chef le président du jury Jean-Yves Clément, les membres du jury et les candidats, qui ont fait vivre le concours au plus haut niveau. Elle pense aussi aux différents partenaires du concours, qui le font s’intégrer dans un paysage musical fort, comme le consul général de France Olivier Gauvin en lien avec l’Institut français et la participation de Murat Cem Orhan, directeur de CRR, qui, chacun, décernent un prix. Ali Darmar, dont l’oeuvre de commande prouve l'ancrage du concours dans le paysage musical turc, est aussi associé à ces remerciements. Elle pense également au rôle crucial d’IKSV avec son prêt d’un piano Steinway and Son. « Nos partenaires offrent de nombreuses opportun