La Hongrie après les élections européennes du 9 juin 2024

Depuis 2010, Viktor Orban, qui fut dans les années 90 le plus jeune premier ministre hongrois de la nouvelle Europe centrale, est revenu au pouvoir au sein d’une coalition alliant son parti conservateur, le Fidesz, avec des éléments parmi les plus populistes et nationalistes de son pays : Jobbik, etc.​

Par Dr. Olivier Buirette
Publié en Juillet 2024

Depuis 2010, Viktor Orban, qui fut dans les années 90 le plus jeune premier ministre hongrois de la nouvelle Europe centrale, est revenu au pouvoir au sein d’une coalition alliant son parti conservateur, le Fidesz, avec des éléments parmi les plus populistes et nationalistes de son pays : Jobbik, etc.

Viktor Orban étant réélu régulièrement depuis presque plus de 15 ans, les résultats des élections européennes du 9 juin en Hongrie seront donc sans surprise, participant ainsi à la majorité issue de ce scrutin.

En mai dernier, le président chinois Xi Jinping a entamé une tournée européenne consacrée à la France, à la Hongrie et à la Serbie. Notons que sur ces trois pays, deux sont critiques et réservés par rapport à l’Union européenne : la Hongrie notamment, malgré son intégration assez récente (2004). Ceci nous montre à quel point, en ce premier quart du XXIe siècle, les relations internationales sont en train de se recomposer. Force est de constater que la nature du pouvoir de Viktor Orban depuis 2010 et son retour aux affaires s’éloignent du mouvement libéral des années 90 et de l’élan de réémergence d’une Europe centrale libre et démocratique. Orban fut en effet le plus jeune premier ministre d’Europe centrale lors de son premier mandat de 1998 à 2002.

Mais pour ce nouveau mandat, et à l’instar de ce qui avait pu être fait en Pologne, voire plus récemment en Slovaquie ou en Serbie, on assiste à la constitution de pouvoirs politiques beaucoup plus forts, plus centralisés et beaucoup moins libéraux au sens politique du terme que dans les pays occidentaux : contrôle des médias, pouvoir judiciaire moins indépendant, ou encore réapparition des thématiques des années 20 sur la nostalgie de la Grande Hongrie, qui avait été amputée d’une très large partie de son territoire après le Traité de Trianon du 4 juin 1920.

En 2024, on le voit, ce genre de thème continue de traverser en profondeur le programme politique en œuvre à Budapest. La coalition du parti au pouvoir, le Fidesz, comporte entre autres, rappelons-le, le parti populaire chrétien démocrate (KDNP), avec des alliances de circonstances avec l’extrême droite.

C’est donc la 4e reconduction de cette coalition depuis les dernières législatives d’avril 2022, avec une politique de remise en cause de l’État de droit, de la séparation des pouvoirs, de la société civile et des libertés individuelles. La crise migratoire a permis elle aussi un durcissement des positions politiques au pouvoir. Enfin, la Hongrie fait partie des États de l’Europe centrale affichant une position de désescalade dans le conflit récent Russie-Ukraine, tout comme la Slovaquie d’un Robert Fico revenu au pouvoir depuis octobre 2023 et soutenant des positions similaires.

Dans ce contexte, la Hongrie ne dénotera pas avec les pronostics concernant la constitution du Parlement européen issu du scrutin du 9 juin. En effet, au moment où nous écrivons cet article, les sondages donnent un net glissement vers la droite du Parlement, puisque sur 705 députés européens, 386 iraient de la droite à l’extrême droite, contre 319 de la gauche à l’extrême gauche.

Le Parlement sortant, rappelons-le, était plus équilibré, avec 353 pour la gauche et l’extrême gauche contre 352 pour la droite et les extrêmes.

Comment ne pas voir là la conjonction avec les sondages centreuropéens et ceux de la France même, où le Rassemblement National (successeur du Front National) est donné largement en tête devant le gouvernement modéré du centre du président Macron ?

Quelle que sera l’issue du scrutin du 9 juin, la première visite d’État depuis 25 ans du président français en Allemagne (des 26 au 28 mai 2024) aura permis deux choses. La première, de rappeler ce rôle moteur du couple franco-allemand, si contesté voire nié ces derniers temps. Mais aussi, lors de la conférence de presse commune du 27 mai à Berlin, de souligner les valeurs de paix et de stabilité que représente l’Union européenne depuis ses débuts.

Voilà sans doute quelques rappels essentiels alors que les tendances les plus conservatrices semblent l’emporter le 9 juin. Quoi qu’il en soit, l’avenir résidera dans le débat démocratique qui en découlera.

Dr Olivier Buirette