Le Festival du Livre de Mouans Sartoux, organisé chaque année depuis 37 ans par la commissaire du festival, Marie-Louise Gourdon, assistée par son équipe mais aussi par plus de trois-cents bénévoles de la petite ville, est un événement littéraire incontournable du début de l’automne, étalé sur trois jours et offrant, en plus des rencontres avec les écrivains, concerts, lectures et spectacles. Cette année, le thème « 
Ma participation comme écrivain au festival pour dédicacer mon dernier roman Lascaris le Sang de Byzance, m’a offert l’opportunité d’échanger avec une multitude de lecteurs et d’auteurs. Et aussi d’assouvir ma curiosité en posant à ces derniers la question suivante : pourquoi écrivez-vous ? Les réponses, multiples, sont passionnantes.
Pour certains, c’est le plaisir de l’invention qui domine. Hervé Beauno, auteur de plusieurs romans parus aux Editions « Au pays rêvé », dont la trilogie D’une vie à l’autre, raconte qu’à l’origine fan de cinéma, il se distrayait en relevant les incohérences dans les films de voyage dans le temps. Puis, il s’est mis à écrire des histoires de science-fiction, qu’il tirait de son observation du monde et de sa réflexion sur les opportunités de créer un monde meilleur. Sa formation scientifique d’architecte naval le pousse à travailler de façon raisonnée, en complétant ses fichiers Word par des tableaux Excell et des graphiques. Par exemple, pour décrire une ville du futur, il en élabore le plan et compte même le nombre de rues et d’immeubles de la cité qu’il imagine, ainsi que le total des appartements.
D’autres voient dans l’écriture une activité artistique. C’est le cas de Violaine Darmon, violon solo à l’Opéra de Nice, qui voudrait renouer avec la tradition antique des conteurs depuis Homère, pour lesquels le texte était indissociable de la musique jouée à la lyre. Enfant, grande lectrice, elle imaginait déjà des contes et se distrayait en composant du théâtre en alexandrins. Aujourd’hui, elle écrit en s’inspirant de l’oralité et participe à des spectacles où elle termine les phrases par des notes. Passionnée de contes et de mythologie, elle a aussi publié pour les enfants les vidéos des Histoires du petit violon magique, où elle mêle le récit aux accents du violon. Elle s’est enfin inventé une mythologie personnelle qu’elle retranscrit dans ses écrits, comme les Contes et légendes des pays d’Atlantide.
Par contre, il est certain que chez d’autres écrivains, l’écriture a permis de surmonter un traumatisme. C’est le cas d’Emma Pey, qui tenait dès l’enfance un journal intime et, encouragée par sa professeure de français, se passionnait pour les rédactions. Ecorchée vive suite à une enfance difficile où elle se sentait rejetée par sa famille, elle se met à écrire à la troisième personne en s’inspirant de son vécu. C’est ainsi qu’elle a élaboré son premier livre, Avant qu’il ne soit trop tard (Éditions Ovadia) et n’a plus jamais cessé d’écrire depuis. Dans ce cas, l’écriture revêt une indiscutable fonction de résilience.
Enfin, il y a ceux et celles pour qui le livre est un vecteur de transmission pour faire passer un message tout en distrayant. C’est le cas de l’auteur de romans policiers Bernard Deloupy, auteur de 17 romans aux Editions Gilletta. Ancien rédacteur en chef-adjoint du Figaro Magazine Provence Côte d’Azur et de l’Express Méditerranéen, il explique que son niveau d’exigence s’est accru au fil des ans, depuis qu’il s’est mis à animer des ateliers d’écriture. Pour travailler, il constitue des fiches de documentation en consultant une multitude de spécialistes, policiers, médecins légistes, magistrats, armuriers puis, mélange le réel et la fiction en s’inspirant de faits divers. Selon lui, le roman policier permet deux niveaux de lecture ; le lecteur peut se contenter de la distraction mais peut aussi recevoir le message que l’écrivain a voulu transmettre en dénonçant un défaut de la société. En ce sens, il se considère comme une sorte de « lanceur d’alerte » et renoue avec le vieil adage de La Fontaine, instruire en divertissant.
En définitive, que ce soit pour l’amour de la création intellectuelle, la passion de l’art, le souhait de prendre une revanche sur le réel ou la volonté de diffuser un message, écrire est pour tous une nécessité. Et tous les écrivains pourraient dire, comme Henry Miller en 1959 : « C’est mon plaisir. Et j’écris comme je respire, pour ainsi dire… »