Moldavie et Géorgie fin 2024, ou le carrefour des influences de l'Est et de l'Ouest

Voici deux États qui sont depuis quelque temps sous les lumières de l’actualité. Durant la guerre froide ‒ dont nous venons de célébrer la fin le 9 novembre dernier avec les 35 ans de la chute du mur de Berlin ‒ ces deux pays ont fait partie intégrante de l’URSS sous la forme de RSS (républiques socialistes soviétiques), au fin fond donc du Caucase soviétique et du Sud-Est européen.

Par Dr. Olivier Buirette
Publié en Janvier 2025

Tout devait changer, nous le savons. Non seulement à partir du moment où en mars 1985, le dirigeant soviétique Michael Gorbatchev, avec sa politique de réformes profondes caractérisées par la perestroïka et la glasnost, devait permettre que les RSS choisissent librement leur émancipation, ce qui va provoquer le démembrement de l’URSS. Mais aussi, avec la dissolution de l’URSS le 26 décembre 1991, qui devait amener à une totale reconfiguration géopolitique autour de la République de Russie et la Fédération de Russie dont le premier président sera Boris Eltsine.

Cette nouvelle carte devait, pour les années 90 et jusqu’au début des années 2000, définir ce que l’on appelle une zone d’influence de l’ancien Empire soviétique. À ce titre, les deux guerres de Tchétchénie (de 1994 à 1996 puis de 1999 à 2000) devaient être significatives, transformant ce petit État du Caucase en une République alliée de la Russie actuelle.

Concernant la période post-guerre froide, les élargissements successifs à l’Est de l’Union européenne et de l’OTAN ont commencé à créer des frictions avec la Russie. Au Nord-Est, ces élargissements vont concerner les trois petits États baltes ‒ qui étaient justement durant la guerre froide des RSS ‒ mais aussi renforcer le voisin polonais, réveillant les vieux antagonismes multiséculaires entre les deux pays.

Si la Biélorussie est restée dans la sphère d’influence russe, la guerre du Donbass depuis 2014, suivie de l’annexion de la Crimée et la guerre avec l’Ukraine depuis février 2022, devaient lancer une période de crise faisant renaitre sous une forme inédite la tension Est-Ouest.

La petite Géorgie avait été annexée à l’empire tsariste dès le XIXe siècle. Mais dans le cas de la Moldavie, nous le savons, ce fut une des résultantes du pacte germano-soviétique d’août 1939. Celle-ci faisait partie alors de la Grande Roumanie crée en 1920, et qui était surtout État successeur des principautés roumaines du XIXe siècle qui avaient acquis leur indépendance suite à la guerre de Crimée menée par Napoléon III de 1853 à 1856. Ces trois principautés jusqu’en 1918 seront composées d’une partie de la Transylvanie, de la Valachie et de la Moldavie-Bessarabie.

On le voit donc, nous sommes bien là face à des régions de confins territoriaux qui se caractérisent par un véritable carrefour d’influences occidentales, caucasiennes, centre-européennes et orientales.

En tout état de cause, il est nécessaire de rappeler que le mécanisme du choix de ces pays de se tourner vers l’Ouest est rigoureusement le même que celui qui avait conduit aux élargissements de 2004, 2007 et 2013.

La démarche est toujours de souhaiter se sécuriser avec l’adhésion à l’alliance militaire occidentale crée en 1949 et dont les missions ont été bien élargies depuis 1989, à savoir l’OTAN ; puis, dans un second temps, le lancement du processus d’intégration dans l’Union européenne qui reste bien encore, aux yeux de ces populations, le vœu d’intégrer une sphère de coprospérité économique et sociale.

C’est incontestablement ce souhait qui aura provoqué le conflit actuel de la guerre russo-ukrainienne depuis 2022 et sans doute en fait depuis 2014 ; et c’est encore ce qui provoque les troubles internes tout récents en Géorgie et en Moldavie.

On rappellera enfin que dans le cas de la Géorgie, une première crise avait eu lieu à l’été 2008 et avait donné lieu à une intervention de Moscou. Mais une solution diplomatique avait alors été trouvée.

La connaissance de l’Histoire est toujours nécessaire pour comprendre les multiples affrontements que notre Europe connait encore, il n’était donc pas inutile selon nous de le rappeler ici.

Avec l’espoir que les acteurs politiques actuels feront de même.