Les climaticides font le bénéfice de TotalEnergies

​Record : la multinationale française TotalEnergies a réalisé un chiffre d’affaire de 21,4 milliards de dollars en 2023. (un article de Clara Marque)

Par Aujourd’hui la Turquie
Publié en Juin 2024

Un capital qui monte en flèche, tout comme les factures d’électricité : 79% des Français, directement précarisés, déclarent avoir réduit leur consommation pour atténuer leurs coûts en 2023. Ce dérangeant profit creuse les inégalités et se base, notamment, sur des scandales écologiques et sociaux aux quatre coins de la planète.

Fondée en 1924, l’entreprise Total a aujourd’hui 100 ans : le moment de dresser un bilan de l’activité de ce géant pétrolier. Dirigée par Patrick Pouyanné, TotalEnergies est devenue, en un siècle, la plus grande entreprise française, produisant et fournissant différents types d’hydrocarbures, pétrole, gaz naturels et électricité. Cette multinationale présente dans plus de 130 pays est connue pour ses scandales sociaux, ses dégâts environnementaux, et a maintes fois été traduite en justice. Revenons sur trois grands climaticides perpétrés au cours de ces dernières années et qui ont participé à l’enrichissement de cette entreprise au détriment de la vie humaine et écologique.

Direction l'Hadramaout, à l’est du Yémen. La terre y est sèche, l’eau y est noire, les cultures et les êtres, cadavériques. Pour cause : l’exploitation par Total du bassin pétrolier « Messila » de 1996 jusqu’à 2015. Un véritable climaticide en chaîne : les terres agricoles sont souillées par les nappes souterraines, elles-mêmes infestées de cours d’eau contaminés par les produits chimiques déversés par l’entreprise. Le journaliste d’investigation Quentin Müller a sillonné ce terrain pour mener une enquête et révéler ce chaos environnemental... et social. Des centaines de cas de cancers ont été signalés dans cette zone. Ces familles yéménites, dont l’environnement et la santé ont été anéantis par le géant industriel, ont porté plainte contre la compagnie pétrolière devant le tribunal de Nanterre. Représentés par l’avocat spécialiste du droit du travail et des conflits sociaux, Fiodor Rilov, ils dénoncent les installations archaïques de l’entreprise et la gestion irresponsable de ses déchets.

De l’autre côté du Golfe d’Aden, en Ouganda et en Tanzanie, la découverte d’un gisement de pétrole sous le lac Albert, en 2006, a conduit à la mise en place d’un chantier pharaonique de Total. Il s’agit du plan de forage « Tilenda » : un oléoduc chauffé, long de 1443 kilomètres et à cheval sur les deux pays de l’Afrique subsaharienne jusqu’à l’Océan Indien. Sur le plan social, selon l’organisation Human Rights Watch, ce projet exproprierait environ 118 000 personnes forcées de quitter leurs terres. Enfants déscolarisés, ménages appauvris… et surtout, les ONG dénoncent une insécurité alimentaire alarmante ainsi qu’un scandale climatique sans précédent : l’oléoduc EACOP, en traversant 16 aires naturelles, contribuerait à émettre 33 millions de tonnes de CO2.

Cap à l’Ouest, dans la région de Patagonie en Argentine. Le projet d’exploitation du gisement de gaz de schiste Vaca Muerta dans la province de Neuquén est responsable d’une pollution massive, catastrophique pour les populations. Les résidus toxiques issus des forages sont déversés à l’air libre et empoisonnent les sols, tout en représentant un véritable risque de contamination pour les nappes phréatiques. À moins de 5 km du site, dans le village d’Anelo, les communautés mapuches qui vivent de l’élevage sur ces sols souillés sont forcées de partir.

En 2018, elles assignent Total en justice.

100 ans d’existence, et une large part de responsabilité dans le dérèglement climatique depuis les années 1965. Si TotalEnergies est de plus en plus puissant, fort d’un bénéfice de 21,4 milliards de dollars, des collectifs se mobilisent pour dénoncer ce géant pétrolier, le traduire en justice et freiner ses actions menant à la destruction du vivant. Le collectif international de citoyens « Stop Total » œuvre pour informer le grand public de ces catastrophes climatiques et sociales, et affaiblir le monopole de ces multinationales fossiles.

Clara Marque