Dette publique : quand Piketty croise le fer avec la France Insoumise (Un article de Alixe Foucaulx)

​Alors que la dette publique française atteint des sommets historiques, les avis divergent sur les solutions à adopter. D'un côté, l'économiste Thomas Piketty prône une refonte fiscale et une redistribution plus équitable des richesses. De l'autre, La France Insoumise (LFI) propose des mesures radicales pour renverser l'austérité et relancer l'économie par l'investissement public massif.

Par Aujourd'hui la Turquie
Publié en Décembre 2024

L’ardoise s’allonge. La dette publique de la France atteint les 112 % de sa richesse nationale, selon un rapport de l’INSEE rendu public le 26 mars 2024. Un score qui fait pâle figure, comparé à celui de l'Allemagne (65 %), de l'Irlande (44 %) ou encore de la Lituanie (37 %). Bien que la France soit responsable de sa propre gestion budgétaire, les politiques de l'Union européenne, notamment la lutte contre l'inflation, compliquent la situation. Avant 1993, la France pouvait obtenir des avances de la Banque de France pour combler les déficits sans emprunter sur les marchés financiers. Aujourd'hui, avec l'euro, les déficits doivent être financés par des dettes souveraines. L'UE favorise une monnaie forte, protégeant les épargnants et les retraités, mais au détriment des ménages endettés, des jeunes locataires et des actifs. Ainsi, les politiques européennes ajoutent des contraintes à la gestion de la dette française.

L’économiste français Thomas Piketty critique largement la gestion de la dette française et l'impact des politiques économiques européennes. Il souligne que les politiques de la Banque centrale européenne (BCE) ont contribué à sauver les banques et les banquiers, tout en négligeant les investissements dans des domaines cruciaux comme l'éducation, la santé et l'environnement. Il dénonce également la concentration des richesses favorisée par ces politiques, les plus riches profitant de la hausse des actifs boursiers et immobiliers. Il critique les règles européennes de libre circulation des capitaux, qui ont mené à un dumping fiscal ‒ stratégie de réduction d'impôts pour attirer des investissements étrangers ‒ et à une sous-imposition des plus riches. Selon lui, ces politiques ont éloigné les classes populaires des urnes et ont renforcé les votes pour des partis populistes, comme le Rassemblement National en France.

Pour la France Insoumise, cette explosion de la dette nationale est issue de politiques néolibérales qui privilégient les intérêts financiers au détriment de l'intérêt public. Ils proposent une renégociation radicale pour soulager les citoyens et l'économie, en priorisant les investissements publics dans les services essentiels et une économie durable. La France Insoumise critique vivement les politiques d'austérité imposées par l'UE et soutenues par le Président, arguant qu'elles ont exacerbé les inégalités et affaibli les services publics. Ils prônent une politique économique basée sur une redistribution des richesses, des investissements massifs dans l'éducation et la santé, et une transition écologique. Ils partagent avec Piketty une opposition aux politiques d'austérité et une critique des inégalités croissantes, mais la France Insoumise insiste sur une action immédiate pour rompre avec le modèle économique actuel, favorisant une restructuration audacieuse de la dette et une transparence totale dans les négociations.

Bien que divergeant sur les méthodes, la France Insoumise et Piketty convergent sur la nécessité de s'opposer aux politiques d'austérité et de réformer le système fiscal pour une plus grande justice sociale. Leur débat reflète des approches différentes mais complémentaires dans la recherche de solutions équitables et durables pour gérer la dette tout en promouvant le bien-être général.