Amnesty International : Israël coupable de génocide à Gaza, un rapport accablant (Un article de Jules Pissembon)

Le 5 décembre dernier, Amnesty International publie un rapport accablant sur les actions menées par les autorités israéliennes à Gaza depuis octobre 2023. Après avoir analysé plus de 200 témoignages et de nombreuses preuves visuelles et numériques, Amnesty conclut sans équivoque au génocide, à la lumière de la Convention de 1948 sur le crime de génocide, qui définit précisément les actes constitutifs de ce dernier.

Par Aujourd'hui la Turquie
Publié en Janvier 2025

Pour l’ONG, les attaques répétées de l’armée israélienne s’inscrivent dans les catégories de « meurtre » et « atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe », interdits par les articles II(a) et II(b) de la Convention. Au cours des deux premiers mois de l’offensive, Amnesty a recensé près de 10 000 frappes aériennes sur Gaza, dont la majorité impliquaient des explosifs à large rayon d’impact, ciblant des zones résidentielles très densément peuplées. Analysant 15 frappes spécifiques entre le 7 octobre et avril 2024, l’organisation accuse Israël de crimes de guerre : ces attaques ciblant directement la population civile ont fait 334 morts, dont 141 enfants, et des centaines de blessés. Amnesty dénonce donc le caractère systématique de ces attaques répétées. Au 7 octobre 2024, on recense plus de 42 000 morts et près de 100 000 blessés, principalement des femmes et des enfants.

Amnesty accuse également Israël de détruire systématiquement les infrastructures essentielles à la survie de la population, imposant des conditions de vie entraînant progressivement l’anéantissement des Palestiniens, en violation de l’article II(c). Deux mois après le début de l’offensive, deux millions de Gazaouis se trouvent déjà en situation de famine critique. La malnutrition affaiblit les systèmes immunitaires, augmentant les risques d’infections et de maladies, tandis que les hôpitaux, eux aussi ciblés, peinent à répondre aux besoins urgents. Un rapport conjoint de la Banque mondiale, de l’UE et de l’ONU indique qu’en janvier 2024, près de 84 % des établissements de santé de Gaza ont été endommagés ou détruits ; 62 % des habitations ont subi le même sort, touchant environ 1,08 million de personnes. Les déplacements forcés dans des conditions périlleuses aggravent la situation. Selon l’ONU, fin août 2024, 84 % du territoire de Gaza était soumis à des ordres d’évacuation, et près de 90 % de la population avait été déplacée au moins une fois. Israël est également accusée d’imposer un blocus rendant presque impossible l'envoi des aides humanitaires suffisantes et nécessaires.

La qualification de génocide exige toutefois de prouver une « intention spécifique » de la part d’Israël. Amnesty conclut que le schéma de comportements systématiques constaté révèle une intention génocidaire, d’autant qu’Israël a ignoré les maints avertissements de l’ONU et de la Cour internationale de Justice, tout comme la probabilité objective que les conditions de vie imposées aux Palestiniens mèneraient à leur destruction physique. Une analyse d’autant plus plausible qu’Israël est accusée de chercher à effacer l’identité palestinienne par la destruction systématique de sites culturels et religieux. Selon le rapport évoqué précédemment, les 17 universités de Gaza ont été détruites, tout comme environ 63 % des sites patrimoniaux. Ces actions s’inscrivent dans une logique de privation culturelle et de négation de l’histoire palestinienne. Une négation qui va jusqu'à leur humanité même, une aliénation du groupe alimentée par les discours racistes des responsables israéliens.

Amnesty appelle ainsi la communauté internationale à réagir face aux crimes perpétrés par Israël à Gaza, qu’elle qualifie de génocide.