Le Groupe de La Haye : une réponse internationale contre l'impunité d'Israël (Un article de Jules Pissembon)

Par Aujourd'hui la Turquie
Publié en Mars 2025

Un tournant historique : pour la première fois depuis la Nakba et la création d’Israël, une coalition politique se structure afin de coordonner ses actions juridiques, diplomatiques et économiques dans l’objectif de mettre un terme à l’impunité de l’État hébreu. Ces pays s’étaient déjà positionnés en faveur du droit international. En décembre 2023, l’Afrique du Sud lançait une procédure contre Israël pour violation de la Convention sur le génocide, une initiative soutenue par plusieurs États. La Namibie et la Malaisie interdisent l’accès de leurs ports aux navires transportant du matériel militaire à destination d’Israël, tandis que la Colombie et la Bolivie ont rappelé leurs ambassadeurs. Mais ces démarches, menées en ordre dispersé, peinaient à produire un effet concret. D’où la nécessité de structurer un front commun. En France, « La France insoumise (LFI) est le seul groupe politique à avoir été convié à la création du Groupe de La Haye », affirme l’eurodéputée Rima Hassan, figure engagée en faveur de la cause palestinienne, dans une publication Instagram le 1er février. Dans un communiqué publié le 5 février, le groupe LFI-NFP appelle à l’intégration de la France au sein de cette alliance afin d’y défendre le respect du droit international. À ce jour, il n’y a pas eu de réponse officielle de l’exécutif à l’appel de LFI.

Varsha Gandikota-Nellutla, présidente du Groupe de La Haye et coordinatrice générale de Progressive International, réaffirme avec force la détermination de son organisation à « honorer ses obligations pour mettre fin à l’occupation israélienne de la Palestine et soutenir le droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination ». Elle dénonce également l’hypocrisie occidentale en matière de droit international et de défense des droits humains. De nombreux États, dont la France, l’Italie et la Hongrie, ont failli à leurs obligations juridiques en refusant d’exécuter le mandat d’arrêt émis en novembre 2024 par la Cour pénale internationale contre Benyamin Netanyahu et Yoav Gallant. Pourtant, en tant que signataires du Statut de Rome de 2002, ils étaient tenus de s’y conformer. Le mandat d’arrêt était le premier visant une personnalité alliée, de fait, aux Occidentaux ‒ un tournant qui n’a pas manqué de provoquer quelques revirements. Les États-Unis, longtemps perçus comme un pilier du régime de droit international, s’en détournent dès lors qu’il ne sert plus leurs intérêts. « Il ne s'agit pas pour les États-Unis d’"abandonner" le droit international. Ils l'ont fait bien avant de sanctionner la CPI le 6 février. Il s'agit pour eux de "détruire" tout semblant de droit international », déclare Varsha Gandikota-Nellutla dans une interview à Middle East Eye. Le 4 février, Donald Trump a signé un décret officialisant le retrait des États-Unis du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, où ils ne siégeaient déjà plus qu’en tant qu’observateurs. Le 6 février, Donald Trump signe un nouveau décret visant à sanctionner la Cour pénale internationale et ses représentants, accusés de s’en prendre à « son proche allié Israël ». Une décision qui, selon une déclaration publiée le 7 février par 79 États parties à la CPI, « augmente le risque d’impunité pour les crimes les plus graves et menace de miner l’état de droit international ».

Le droit international s’est longtemps imposé comme un levier de l’hégémonie occidentale. Mais, comme tout outil, il est écarté dès qu’il ne sert plus les intérêts de ceux qui l’ont façonné.